Naviguer pour la première fois sur le bateau que vous avez vous-même construit, c’est tout simplement… fantastique!
Eduard Kerstiens construit un bateau en mortier modifié. Nous l’avons rencontré, car il est venu frapper à la porte de Grouttech afin d’acquérir un lot important de mortier PCC spécialement renforcé aux fibres, et en outre pour louer une pompe spécifique de Grouttech dans le but de pulvériser ce mortier sur un treillis métallique. Lorsque notre sales manager Hans Renkema a eu vent de ce projet, il a évidemment été intrigué et il s’est rendu à plusieurs reprises à Dokkum, sur le chantier naval, afin d’observer ce qui s’y passait. C’est avec plaisir que nous vous présentons ce constructeur naval tout à fait particulier.
Eduard aime dessiner et concevoir des voiliers, mais c’est un passe-temps qui ne permet pas facilement de gagner sa vie. «À moins - explique-t-il - de suivre tout d’abord une formation ennuyante, pour entrer au service d’un constructeur maritime, pour qui vous pouvez ensuite concevoir une centaine de fois à peu près le même modèle de bateau». Un tel parcours n’est pas du goût d’Eduard Kerstiens. Donc, s’il veut un jour effectivement voir naviguer un bateau de sa conception, c’est à lui de le construire.
Pourquoi ne pas se contenter d’un modèle ?
«Évidemment, je peux bien construire un modèle, et c’est d’ailleurs ce que j’ai déjà fait plusieurs fois. Mais si un modèle navigue bien, cela ne veut pas toujours dire qu’il en sera de même avec l’objet réel. Je construis donc aussi des bateaux grandeur nature. Faire pour la première fois de la voile sur un bateau que vous avez vous-même construit et constater qu’il se comporte bien, c’est tout simplement… fantastique! C’est le troisième que je construis à partir de mes propres dessins et conformément à mon propre modèle de calcul de la stabilité. Les deux premiers avaient une longueur de seulement sept mètres. Il s’agissait en fait plus de projets expérimentaux pour le bateau que je suis en train de construire actuellement. Ces deux bateaux expérimentaux fonctionnaient parfaitement. Voilà pourquoi j’ose me lancer aujourd’hui dans celui-là. Ce bateau-logement, capable de naviguer en haute mer, aura une longueur de vingt mètres.»
Quel sera le nom du bateau?
«Foe Yong Hai ! En effet, il s’agit d’une jonque chinoise. Un bateau élevé, dont le bastingage émergera à l’avant de 3,3 mètres et à l’arrière d’encore un mètre de plus. L’avantage est qu’à l’intérieur je pourrais me tenir debout dans toutes les pièces. Construire une jonque n’est pas chose facile, car il n’existe pas de plan d’encombrement officiel. Seules d’anciennes illustrations. Le bateau sera aussi pourvu de dérives latérales, une invention chinoise. Le gréement est également chinois. Une seule adaptation sera réalisée sous l’eau, car un bateau à fond plat et équipé de dérives peut bien changer de cap facilement, il ne peut pas très bien naviguer en ligne droite. Il faut alors continuellement corriger la direction. C’est pourquoi le Foe Yong Hai sera pourvu d’une gigantesque carlingue de 12 tonnes, qui doit améliorer les caractéristiques de navigation.»
Pourquoi du béton?
Lorsque l’on commence avec rien, il est possible de choisir tout ce que l’on veut. Les bateaux en bois fuient toujours, ou il faut les enduire de résine époxyde. J’ai déjà essayé parfois de le faire, mais je déteste l’entretien, et d’ailleurs le bois pourrit quand même de l’intérieur. En bref, sur le plan de la technique d’entretien, du bois dans de l’eau douce c’est une véritable calamité. Mais cela est également le cas du métal dans l’eau de mer. Il faut aussi continuellement poncer et peindre pour lutter contre la rouille. C’est là qu’intervient le béton. Ma jonque aura une coque qui n’exige pas d’entretien.
Comment s’est déroulé le processus de construction?
J’ai d’abord réalisé une construction en bois sur laquelle j’ai bâti une armature très dense. Cent treillis de 2x3 mètres, avec en tout environ 20000 points de soudure. J’ai ensuite rempli cette armature de mortier PCC, à l’aide de la pompe à mortier Grouttech P06, un dispositif qui mélange le mortier et l’eau, pousse ce mélange sous pression dans un tube de 20 mètres de long pour le pulvériser par une buse sur le support à traiter.
De quelle sorte de mortier s’agit-il?
Il s’agit d’un mortier de réparation de haute qualité, modifié par ajout de polymères. Ce matériau a une longue durée de mise en œuvre, de sorte qu’il est possible d’obtenir un beau résultat final, même si l’ouvrage prend du temps. Les parois ont une épaisseur de 3 cm, le fond de 4 cm. La coque nue, telle qu’elle est actuellement, pèse tout juste moins de 20 tonnes. Lorsque le bateau sera terminé, il comptera quatre chambres à coucher, une petite salle de séjour de 4 x 4,5 mètres, une salle de bains, une cuisine et une salle des machines équipée d’un moteur diesel. Il aura un déplacement d’eau total de 47 tonnes.
Le béton est-il suffisamment résistant?
Selon mes calculs, le béton est aussi résistant sinon plus résistant que l’acier d’une épaisseur de 1 cm. Le béton est en outre plus élastique que l’on pourrait imaginer. Mes parois d’une épaisseur de 3 cm peuvent tranquillement être enfoncées de 2 cm sur une longueur de 2 mètres sans que rien ne se passe. Avec le temps, sous l’effet du battement continuel de l’eau, la coque des bateaux en acier se déforme et finit par avoir l’aspect d’une planche à laver. Avec ce bateau en béton, je ne crains pas que cela se produise. Le moment le plus palpitant sera lorsque la coque devra être retournée. Elle est en effet conçue pour se trouver droite dans l’eau et non pas sur le côté sur la berge.
Bonne chance avec cet exercice Avez-vous tiré profit de votre collaboration avec Grouttech?
Certainement. Hans Renkema a participé à la pulvérisation d’éprouvettes. Tout au début, il est venu en voiture jusqu’ici, avec trois sacs de mortier. Il m’a aussi donné de nombreux conseils. C’était d’ailleurs bien nécessaire, car cette application pour ce produit, personne ne le fait de cette manière. J’ai donc dû découvrir tout par moi-même. Mais Hans m’a toujours assisté, m’a donné des idées. Il était lui-même aussi super enthousiaste à propos de ce projet. Chez Grouttech, ils comprennent combien tout cela signifie pour moi.
Vous avez beaucoup investi dans ce projet…
Oh oui, j’ai même vendu ma maison afin de pouvoir construire ce bateau. Cela me permet maintenant de travailler pendant deux ans à la réalisation de mon nouveau logement flottant. Par ailleurs, je pourrais ensuite me loger à bon marché, car il est possible de jeter l’ancre gratuitement à de nombreux endroits aux Pays-Bas. À ce moment-là je devrais toutefois reprendre mon entreprise de petits travaux dans le bâtiment: Klusbedrijf Kers. Jusqu’à présent, je construisais principalement des petites cuisines et parfois un bateau. Mais lorsque ce projet sera terminé, cela me fera de la publicité. Qui sait, peut-être obtiendrai-je alors de temps en temps une commande pour la construction d’un bateau de bonne taille. Ce serait tout simplement… fantastique!